Je pense, moi ? pas sûr ! ou alors comment, sur quoi ça s’appuie, l’impression de penser …
Ce matin dans mon lit, j’allume la radio, France Culture, ça parle et j’écoute mais plus ou moins. Je me retrouve en train d’écrire, de décrire une image, que je vois très précisément : c ‘est une photo, NB, un couple, l’hoomme tient sa bicyclette équipée d’un grand panier, porte-bagages (c’est le panier qu’on voit dessiné lorsqu’on veut faire des achats sur internet). De l’autre côté du vélo, la femme, elle hésite à donner le bras à l’homme et appuie la main sur le panier, se solidarisant ainsi de l’homme mais pas tout à fait, il y a l’intermédiaire, panier plus vélo.
Dans mon rêve semi-éveillé je suis donc en train d’écrire, au clavier, et j’ai une phrase calquée sur une lecture, et j’ai écrit « tout soudain ». « Tout soudain », je l’ai lu il y a deux trois jours, qui annonçait la parution d’un livre. Je ne sais pas la suite de la phrase, j’étais la relisant, voulais la modifier mais quelque chose me gênait, se mettait en travers.
Qu’est-ce qui m’empêchait de rectifier, de compléter cette phrase ? la radio ? c’était l’émission Terre à terre, de Ruth Stégassy. Radicale, et tenant à écrire la suite, je coupe la radio et aussitôt, l’image que je voyais si bien s’évanouit, et ma phrase avec. La voix que j’entendais me servait de support, pour voir, pour écrire pour penser. J’ai rallumé et l’image est réapparue !
Besoin de faire deux choses à la fois ? de lutter contre ? je n’ai pas l’impression de lutter mais bien de m’appuyer, d’avoir un support indispensable, nécessaire pour me sentir exister. J’écoute donc je suis. Bien sûr il n’est pas question de se mesurer à Descartes et d’ailleurs la célèbre formule est souvent reprise et adaptée à des pubs.
Un peu plus tard, je suis debout, la radio m’accompagne toujours, Répliques : ce matin on parle de Montaigne, deux invités, Pierre Manent et Frédéric Brahami. Montaigne, ce continent ! Monique Chambaud, son père, le lisaient le relisaient sans cesse et moi, je commence, lis qq jours puis passe à autre chose, et me propose toujours (ou seulement furtivement) de m’y mettre …
http://www.franceculture.fr/emission-repliques-penser-avec-montaigne-2014-04-05
Une phrase me frappe, je cite comme je peux : Montaigne fonde la littérature ; il dit c’est en écrivant que je deviens moi-même. Il faut que je retrouve cette phrase, reprendre Répliques.
Et, en écoutant Finkielkraut et ses deux invités parler de Montaigne, je balaye, oui, pelle, balai, les poussières se voient bien quand un rayon de soleil vient les illuminer. Je balaye et j’écoute et je me dis des tas de choses, ce que je crois être « penser ». Ce qui m’importe c’est ce support. Sans la radio, sans prêter l’oreille, je n’existe pas.
Et il y a des années, je peux dire toujours, j’écoute la radio, je « mets » la radio et j’en vis. Elle me porte. Hier soir c’était une évocation de Walter Benjamin, prononcé Binjamin et Bennyamine, et ça marque l’époque … Un moment la voix, le raisonnement de Stéphane Hessel cherchant à identifier la voix de « Bennyamine » qu’il a connu. L’entrecroisement des voix actuelles, l’évocation de voix d’avant, moi qui écoute et vaque à mes occupations ou flotte … Attrape le ballon, je le veux. Mais il s’échappe.
http://www.franceculture.fr/emission-l-atelier-du-son-ramuntcho-matta-%20-philippe-baudouin-pour-les-ecrits-radiophoniques-de-walt
Onze heures ! Stop !